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Cadre légal

« Quiconque se demande ce qu’il convient de faire au sujet des médias doit se demander ce qu’il convient de faire à propos du monde dans lequel ces médias œuvrent. On ne peut répondre à cette question sans trouver une réponse réaliste à l’autre. »

Zygmunt Bauman (2000, 121)


Afin d'établir le cadrage juridique régissant les médias au Maroc, la présente étude se veut une analyse des lois relatives à la réglementation, la régularisation et le contrôle des aspects du secteur médiatique.

Faisant suite aux revendications des citoyens en termes de liberté de la presse et de l’expression, le Maroc a garanti la liberté de la presse dans la constitution de 2011, une liberté qui « ne peut être limitée par aucune forme de censure préalable ». Quelques années plus tard, le Maroc adopte un nouveau statut de la presse et de l’édition, notamment avec la promulgation des lois 88-13, 89-13 et 90-13 en 2016. Le 12 mars dernier, la loi 31-13 relative au droit d’accès à l’information entre en vigueur et fixe le champ d’application ainsi que les conditions et les modalités d’exercice de ce droit. Toutefois, la formulation de certains textes de lois et décrets relatifs à la régulation du secteur médiatique contient un floue juridique qui joue en défaveur de la liberté de la presse.

Nous nous attacherons en premier lieu à présenter le cadre juridique général régissant le secteur médiatique. Nous retracerons en second lieu le cadre juridique du contrôle de la concentration et de la transparence, pour finir par une analyse de l’ensemble des textes garantissant le principe de la neutralité du Net.

Le paysage médiatique marocain est régi par plusieurs textes de loi. Les articles 25, 27 et 28 de la constitution de 2011 disposent expressément que le secteur de la presse soit organisé et géré de manière indépendante et sur des bases démocratiques. La constitution garantit ainsi le droit d'accès à l'information, la liberté de presse et de l'expression. Au cours des dernières années, des textes juridiques fixant les règles d'organisation et de contrôle des moyens publics de communication ont vu le jour, afin de garantir l'accès à ces moyens tout en respectant le pluralisme linguistique, culturel et politique de la société marocaine.


Le cadre légal organisant le secteur médiatique au Maroc recouvre la constitution en premier lieu. En tant que loi suprême du pays, la constitution consiste à mettre en lumière le nouvel élan qu'a fait le Maroc en créant un État moderne de droit, qui respecte les normes de la démocratie et des droits de l'homme. En outre, des lois s’ajoutent à la constitution pour régir le secteur des médias au Maroc :

·      La loi relative à la poste et aux télécommunications (1997) qui cadre le processus de libéralisation du secteur des TIC ;

·      La loi relative à la communication audiovisuelle (2005) qui régule le secteur de l’audiovisuel et met fin au monopole d’État sur le secteur. Loi qui a été modifiée et complétée par les textes 83.13 et 96.14 ;

·      La loi 88.13 relative à la presse et l'édition ;

·      La loi relative à la protection des données personnelles 13-103 ;

·      La loi 89-13 portant sur le statut des journalistes professionnels ;

·      La loi 90-13 portant création du Conseil National de la Presse.

Le cadre légal inclut également des conventions internationales (des conventions relatives aux droits de l'Homme, la Déclaration de Marrakech à l'occasion du forum des médias sur le continent africain…), des contrats programmes (notamment ceux en rapport avec la modernisation des entreprises de presse écrite), ainsi qu’une charte de déontologie de presse, récemment adoptée par le Conseil National de Presse.

D’ailleurs, la liberté de la presse est mise en exergue par les textes législatifs en vigueur. En effet, la constitution marocaine garantit la liberté de pensée, d'opinion et d'expression (art 25), et la liberté d'accès à l'information (art 27). Cette dernière mesure consiste à faciliter aux journalistes l’accès à l’information (sauf celle qui revêt un caractère confidentiel), et à mettre fin au clientélisme administratif et politique. Principe détaillé par la loi 88-13. Ladite constitution garantit également le droit d'exprimer et de diffuser librement les informations, les idées et les opinions, dans les limites prévues par la loi (art 28). Quant aux dispositions de la loi 88-13 relative à la presse et à l'édition (art 7), l'État s'engage à garantir la liberté de la presse, la consécration de la démocratie et la pluralité des médias.

Malgré ce tissu législatif consistant, certains articles contiennent des formules ou des formes susceptibles de nuire à la promotion du pluralisme des médias ainsi qu’au travail des journalistes. En effet, au niveau du principe de la liberté d’accès à l’information, les informations confidentielles comme exception laisse un champ fertile aux administrations pour ne pas collaborer et « manier » ce principe à leur guise. Aussi, le droit d’exprimer et de diffuser librement l’information dans certaines limites laisse entendre une censure implicite du travail du journaliste.

Par ailleurs, la presse digitale, en pleine expansion, est juridiquement défini au même titre que les médias régis par les dispositions de la loi 88-13. Le service de presse électronique est ainsi organisé sous un nom de domaine et suivant un système de gestion du contenu. Les journalistes exerçant leurs activités dans les plateformes en ligne n’ont pas de statut propre ou différent de tout journaliste professionnel, qui lui est défini par la loi 89-13 comme toute personne exerçant leur activité dans les entreprises écrite, électronique, radiophonique ou audiovisuelle.

 

 

Pas de règle spécifique à la concentration verticale.

Il n’existe pas d’indicateur spécifique ni de méthode d’évaluation de la concentration des médias au Maroc. La structure de la propriété des sociétés médiatiques est soumise à l’examen des autorités de régulation avant que ces dernières n’approuvent l’autorisation ou le renouvellement d’une licence. Les sociétés médiatiques sont également soumises aux lois s’appliquant à toutes les entreprises du pays au travers du Conseil de la Concurrence. Ce dernier a des pouvoirs limités, même s’ils ont été renforcés depuis 2014.  
La législation ne comporte aucune provision spécifique à la concentration verticale (LIEN INDICATEURS). Toutefois, d’après la loi de 2016, un opérateur de communication audiovisuelle ne peut  détenir une participation dans le capital que d’une seule société propriétaire de journaux. En vertu de l’article 11 de la loi relative à la presse et à l’édition, « toute personne physique ou morale qui détient plus du 30% du capital ou des droits de vote d’un établissement de presse doit en faire déclaration auprès du Conseil National de la Presse et tout établissement de presse qui détient plus de 10 % du capital d’un autre établissement de presse doit en faire déclaration au CNP et au Conseil de la Concurrence. Les secteurs de la presse papier et numérique sont les seuls auxquels ces règles s’appliquent.

Face au pluralisme des acteurs de la télécommunication au Maroc, l'ANRT dispose des pouvoirs limitant la concentration économique et les pratiques anticoncurrentielles. Selon l'article 8 de la loi 24-93, l'interconnexion et l’accès aux différents réseaux publics de télécommunications doit impérativement être concertée avec les conditions réglementaires, techniques et financières. Ainsi, les offres doivent être acceptables, objectives et non discriminatoires qui garantissent une concurrence loyale.

 Ainsi réglementées par les articles 6, 7 et 8 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, la législation en vigueur prohibe tout essaie, d'une entreprise ou d'un groupe à avoir empêcher, restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur le marché, notamment par:

·       Des actions concertées, conventions, ententes et/ou coalitions expresses ou inexprimés;

·       l’exploitation abusive des réseaux de télécommunication pour monopoliser une activité en relation;

Les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation    
Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ne peuvent pas prendre part au capital d’un autre FAI (LIEN REG. SAFEGUARD – concentration).
Ces cinq dernières années, aucun cas de litige n’a été rapporté ou traité en justice concernant la concentration des médias. 

Les institutions régulatrices

Au Maroc, il existe une autorité de régulation pour chaque secteur médiatique. Aucune n’a d’obligation publique à rendre des comptes.
L’Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications (ANRT) a été créé en 1998 suite à la loi relative à la poste et aux télécommunications (1997). C’est une institution publique dont la mission (https://www.anrt.ma/reglementation/presentation) est, entre autre, de :

  • gérer le spectre des fréquences radioélectriques en attribuant des fréquences aux réseaux publics et indépendants de télécommunications ;
  • recevoir les plaintes relatives aux interférences

La Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA) a été créé en 2002 afin d’attribuer les licences dans le secteur audiovisuel et de superviser l’ouverture du secteur aux opérateurs privés. En 2011, elle a été élevée au rang d’institution constitutionnelle en tant qu’ « Institution de régulation et de bonne gouvernance ». En tant que telle, elle compte parmi ses missions de  

  • donner avis au Parlement et au Gouvernement sur toute question dont il serait saisi par le Premier ministre ou les présidents des chambres du Parlement et relatives au secteur de la communication audiovisuelle 
  • réguler le secteur audiovisuel (ce qui inclut l’attribution des licences et des autorisations :, l’approbation des cahiers des charges des opérateurs publics, l’assignation des fréquences attribuées à la communication audiovisuelle, l’assignation des fréquences attribuées à la communication audiovisuelle )
  • édicter les normes d’ordre juridiques ou techniques applicables à la mesure de l’audience des entreprises de communication audiovisuelle. (LIEN RESULTAT MESURE D’AUDIENCE)

Le Conseil national de la presse (CNP) a été créé en 2016 pour assurer l'indépendance du secteur de la presse de l'administration. Son autorité s’étend à la presse papier et à la presse numérique. Au moment de la publication du MOM Maroc, le CNP n’était toujours pas installé, laissant au Ministère de la Culture et de la Communication le soin de délivrer les cartes de presse. Une fois installé, le CNP sera en charge de :
    •    prendre des sanctions disciplinaires (article 46)
    •    attribuer les cartes de presse
    •    examiner les droits de vote et les divisions de capital des organes de presse

Le Conseil de la Concurrence (CC) a été créé en 2008 afin de lutter contre les pratiques anti-compétitives et de réguler la compétition sur le marché marocain. C’est une institution constitutionnelle, tout comme la HACA. Son domaine de régulation ne s’applique pas seulement aux médias. Jusqu’en 2014, le Conseil de la Concurrence avait des pouvoirs très limités et ne jouait qu’un rôle de conseil. Suite à une série de réformes ce dernier a acquis des pouvoirs de décision, d’enquête et de sanction.

Il est important de noter que ces institutions ne sont pas exemptes d’interférence politique, comme par exemple, en ce qui concerne la nomination de leurs dirigeants, ce qui a un impact sur le secteur.

Les interférences de l’exécutif et leurs implications sur la réglementation

Suite à la fin du monopole d’Etat sur le secteur audiovisuel en 2005, les procédures d’attribution de licences pour les radios et télévisions ont été supervisées par la HACA (voir intro radio). Le 11 Août 2008, cette autorité a lancé un appel à concurrence pour l’établissement et l’exploitation de deux services télévisuels à couverture nationale. Début 2009, la HACA a déclaré que l’admission de tout nouveau projet de télévision nationale présentait « un risque important de déséquilibre pour le secteur » , s’appuyant notamment sur le cas de l’attribution de la licence de Médi1 Sat en 2006 (devenue Médi1 TV), qui connaissait alors des difficultés financières. Lors de la privatisation de Médi1 TV, la HACA n’a pas lancé d’appel à la concurrence. Alors que l’Autorité maintient ses positions, les arguments de la taille du marché et de la non viabilité des télévisions nouvellement créées sont largement critiqués par les acteurs du secteur. La HACA n’est pas tenue d’expliquer ces décisions publiquement et les raisons d’un refus d’attribution de licence n’ont pas à être rendues publiques.

Plus récemment en 2016, Azzedine El Mountassir Billah, le directeur général de l’ANRT a été licencié sans motif apparent. Cela est survenu après que l’ANRT a adressé un avertissement à Maroc Télécom (Itissalat Al-Maghrib, IAM), une société co-détenue à 30% par l’Etat marocain.

Dans les faits, nous distinguons une « double dépendance » des médias dans le contexte marocain. L’une vis-à-vis du champ économique et l’autre vis-à-vis du champ politique. Ces deux contraintes sont intimement liées, ce qui montre le poids de l’État et de son influence dans le secteur médiatique au Maroc. En effet, au lieu de faire recours à une censure directe, le boycott publicitaire prend en charge l’affaire. Autrement dit, le pouvoir politique s'exerce aujourd'hui sur le secteur médiatique sous la forme indirecte du pouvoir économique. Les entreprises médiatiques continuent à être soumises aux mécanismes du marché. D’ailleurs, le processus de la production d’une information pertinente et in situ fait de cette dernière un produit qui coute cher et les recettes de vente deviennent généralement insuffisantes pour couvrir la totalité des charges et équilibrer les comptes. Par conséquent, les entreprises médiatiques de presse cherchent d’autres sources de financement en faisant recours à la publicité en tant qu’un de ces sources.

 

 

 

 

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